La clôture des Jeux Paralympiques est l’occasion de mettre en lumière ces personnes en situation de handicap qui sont allées au bout de leur passion et qui aident à rendre le monde plus inclusif.
Dorine Bourneton en est un très bon exemple.
Assise dans un fauteuil, mais dotée d’une combativité et d’un mental d’acier, cette exploratrice et pionnière dans l’âme a voulu croire en ses rêves et a refusé d’abandonner son ambition : devenir pilote de voltige aérienne.
Elle a démontré que valides et handicapés peuvent non seulement vivre ensemble, mais également travailler main dans la main, avec toute la rigueur nécessaire. Elle nous aide en cela à faire changer les mentalités et à avoir un nouveau regard sur le monde du handicap.
Née dans le Puy-de-Dôme en 1974, Dorine Bourneton a très vite été gagnée par le virus de l’aviation ; la passion de son père. Pilote amateur, il lui expliquait qu’elle pouvait devenir la première femme pilote de Canadair ; elle dit d’ailleurs qu’elle ne serait pas devenue pilote sans ce père-là.
Ses modèles sont les pionniers de l’aviation tels Antoine de Saint Exupéry ou Jean Mermoz.
À 15 ans, elle fait son premier vol solo et rêve de devenir une pilote professionnelle.
Un an plus tard, en 1991, elle est la seule rescapée du crash d’un avion de tourisme dont elle était passagère. Les mauvaises conditions météorologiques sont en cause.
Les secours finissent par la retrouver, presque par miracle, après 12 heures de recherche. Les 3 autres personnes sont mortes sur le coup. En apparence, elle semble aller bien, mais la moelle épinière est touchée, elle y laissera ses jambes. Devenue paraplégique, elle se déplacera dorénavant en fauteuil roulant.
Elle perd ses jambes, mais pas sa passion ni son envie d’une vie d’aventures. C’est d’ailleurs pour elle une renaissance : remplacer ses jambes par des ailes pour pouvoir tutoyer l’adrénaline malgré les obstacles . Elle décide donc qu’elle reprendra les commandes d’un avion. La suite sera un long combat.
Pour devenir pilote d’avion, les jambes sont nécessaires. Le palonnier, que le pilote oriente avec ses pieds, permet à l’avion de virer. Dans son cas ; il lui faudra appareiller un avion d’un malonnier; qui permet de faire la même chose que le palonnier, mais avec la main.
En 1995, elle passe avec succès son brevet de pilote privé. C’est une première victoire. Mais elle en veut plus. Elle souhaite en faire son métier et former des pilotes à son tour.
Malheureusement, la profession de pilote ainsi que la voltige sont interdites aux personnes en situation de handicap. Qu’à cela ne tienne, elle se battra pour faire changer la réglementation. En 1997, elle crée, avec son ami Guillaume Féral (lui-même pilote paraplégique), la Commission Pilotes Handicapés de l’Aéro-club de France qui porte le projet d’une nouvelle réglementation en faveur des handicapés.
En 2003, après un combat éreintant, c’est la récompense ultime : l’arrêté qui autorise les personnes handicapées à obtenir la licence de pilote professionnel est enfin signé. Autrement dit, un paraplégique peut désormais vivre du métier de pilote.
Dorine Bourneton ne deviendra pas pilote professionnelle pour autant, mais son combat a servi à bien d’autres pilotes handicapés.
Suite à la naissance de sa fille en 2006, Dorine Bourneton, ne veut plus prendre aucun risque et s’interdit de voler pendant plusieurs années.
En 2013, elle est sollicitée pour une présentation en vol au meeting aérien du Salon International de l'Aéronautique et de l'Espace du Bourget. C'est pour elle un défi. La démonstration, très remarquée, animera à nouveau ses rêves de voltige et la poussera à assouvir sa passion.
C’est donc après une interruption de 7 ans, qu’elle s’autorisera à reprendre le pilotage d’un avion et s'orientera vers la voltige aérienne ; discipline qui correspond mieux à son tempérament. Reste à équiper un avion et à convaincre une école de voltige.
En 2015, elle obtient le feu vert de l’armée de l’air pour devenir pilote de voltige. Elle obtient sa qualification de voltige élémentaire et devient ainsi la première femme au monde pilote de voltige en situation de handicap.
Maîtrise, courage, persévérance et nécessité d’évoluer en permanence en dehors de sa zone de confort ; elle dit de cette discipline que c’est une école du dépassement de soi qui lui permet de retrouver un équilibre entre le corps et l’esprit.
Son fauteuil roulant reste au sol ; dans le cockpit en pleine figure de voltige, son handicap est invisible.
En 2018, Dorine Bourneton en pilotant son avion de voltige, un Cap 10, remporte la coupe Sud catégorie Espoir ; il s’agissait de sa première compétition de voltige face à une dizaine de pilotes valides. Preuve, s'il en est, de son appartenance à cette grande famille de l'aéronautique.
Une double victoire pour Dorine Bourneton qui s'est toujours battue pour ne pas être réduite à son handicap.
Dans ses différents discours, Dorine Bourneton confie que le soutien de son entourage, et notamment de sa famille, a été un élément déterminant pour l'aider à se battre. Se battre pour faire progresser la cause des paraplégiques dans l'aviation et ainsi pouvoir reprendre le chemin des airs.
La vie affective est une autre facette compliquée où il faut faire preuve de détermination. Le fauteuil roulant étant un obstacle difficile à accepter de part et d’autre. Dorine Burneton rencontrera Bruno, informaticien, et ils finiront par se marier en 2004. Sa patience et ses encouragements sont pour elle un support indéfectible.
Après son mariage en 2004, naît la petite Charline (clin d’oeil à “Charl'indbergh”) en 2006. Elle n’ose plus voler de peur de mettre sa vie en danger. Elle s’arrêtera pendant 7 ans et se tournera alors vers d’autres horizons. Elle reviendra finalement à sa passion pour l’aviation en 2013. Aujourd'hui, c'est son regard qui la porte plus haut chaque jour.
Dorine Bourneton est à l’origine de la création de “Envie d’envol”; une association qui favorise l’inclusion des personnes en situation de handicap grâce à la voltige aérienne. Elle apporte également son soutien en tant que :
Sa détermination et ses engagements sont une source inspiration quotidienne et auront été récompensés par la Médaille de l'Ordre National du Mérite en 2009 ainsi que la Médaille de l’Ordre National de la Légion d'Honneur en 2015.
Il existe même une rue qui porte son nom à Andrézieux-Bouthéon (Loire); on y trouve l'Envol Stadium…
C’est en 2002 qu’elle écrit son premier ouvrage “La couleur préférée de ma mère”, suivi en 2015 de “Au-dessus des nuages”. Ce deuxième livre est le témoignage d’une mère, mais surtout d’une pilote à sa fille. Elle y explique pourquoi voler et la voltige l’aident à donner un sens à son accident.
Aujourd’hui, Dorine Bourneton donne des conférences en entreprises sur l’audace et le dépassement de soi.
Elle s'implique également en tant que citoyenne et a été élue conseillère municipale à la ville de Boulogne-Billancourt.